mercredi 30 avril 2014

L'heure du pivot pour l'association des centraliens

Avec la fusion de Centrale et Supélec, les association d'Alumni vont suivre. Ne serait-ce pas l'occasion de se réinventer un peu ? Nous avons écrit à celle des Centraliens pour proposer un Reboot de la revue interne :

"Chère Catherine,

Suite à notre entretien je te mets par écrit mes propos pour référence.

La cause de l'association se doit d'être : promouvoir le rayonnement de l'excellente ingénierie à la française. 

Sans remettre en cause les activités actuelles (carrière, entraide, etc.), nous devons nous focaliser sur cette Raison d'être pour laquelle nous sommes à la fois Pertinents (au sens : nous avons les moyens, la capacité d'action) et Légitimes (au sens : nous sommes les mieux positionnés pour agir, à égalité peut-être avec IESF).

Le nouveau logo de CentraleSupélec
C'est grâce à ce parti-pris affirmé pour une Cause que nous revigorerons notre communauté qui désaffecte l'association car elle n'y trouve pas de sens. Ce dessein est d'autant plus noble qu'il est contributif à la société en général, supérieur à nos petits intérêts individuels ou communautaires, et donc s'engager dans l'association devient une démarche altruiste et non plus corporatiste. Nous les Centraliens, nous mobilisons au sein de l'association pour servir la société.

Venons-en au rapport avec la Revue. Concrètement, s'engager sur cette voie impliquerait pour la Revue de devenir une publication spécialisée sur l'innovation, l'entrepreneuriat, et le leadership de demain ("Leader, Entrepreneur, Innovateur"...), en langue française. Disponible à tous publics, sur le web, par abonnement et en kiosque, à l'image des nombreuses publications qui existent en anglais sur ce domaine (Wired, FastCompany, TechCrunch, Harvard Business Review, etc.). L'existence de ces revues prouve qu'il y a un marché mais il y a malheureusement un manque cruel en langue française, au grand détriment de notre écosystème #FrenchTech (qui s'étend à tous les pays francophones). La rentabilité de la revue en serait assurée et les retombées positives sur la communauté Centrale Supélec seraient conséquentes en terme d'aura et de réputation. La place est à prendre, nous en avons les moyens !

Nous garderions bien entendu une section dédiée à notre communauté, mais la couverture et l'essentiel des pages intérieures seront des articles de haute qualité pour lesquels aucun corporatisme ne saura influencer le verdict d'un rédacteur en chef qui sera garant d'une ligne éditoriale forte. Je n'ai aucun doute que nous trouverons des personnes très qualifiées pour contribuer vu étant donné qu'à ce jour elles n'ont aucune plate-forme sur laquelle s'exprimer.

Je reste tout à votre disposition si vous souhaitez m'entendre donner plus de détails sur cette vision."

mercredi 23 avril 2014

Appel à l'indignation face à la mise en examen de Nicolas Colin

Jean-Christophe Despres résume magnifiquement la situation dans cet article de La Tribune : Nicolas Colin est mis en examen pour un article de blog qu'il a écrit fin 2013 sur l'incapacité de la G7 à réagir face à l'arrivée d'acteurs innovants dans sa filière.


Nous avons demandé à Maud Franca la permission de reprendre ses mots que nous avons trouvés si justes pour expliquer notre soutien :
Nous signons cette pétition car les enjeux de l'innovation sont cruciaux pour l'avenir de notre pays. Ils ne peuvent être brimés par la volonté de certains de retarder une transformation inéluctable. Les conservatismes et réactions de peur face à l'avenir ne peuvent être des solutions. Dans l'histoire, ils ont toujours conduit au pire. Rien de bon. Ils impliquent de subir l'avenir plutôt que de le maîtriser et nous mettent dans une attitude défensive néfaste. La France ne peut se permettre de regarder les trains passer et de voir les autres pays avancer sans elle. Le changement est là et nous ne pouvons faire la politique de l'autruche ou manquer de vision.  Monde nouveau ne signifie pas faire table rase du passé. Tout est continuité et mémoire. Toutefois des modèles économiques et sociétaux arrivés à bout de souffle nécessitent des ruptures. Le renouveau est dans l'ordre des choses. Et l'important dans ces sujets est aussi celui de la régulation.
Par ailleurs, nous signons car la liberté d'expression est un droit fondamental. Il est regrettable que dans notre pays, celui des Lumières, on en arrive à faire un procès en diffamation parce que quelqu'un, qui soit-il, exprime ses idées.
Enfin nous signons car Nicolas Colin a eu le courage et l'intelligence de soutenir le changement, ne fusse-t-il parfois des plus populaires. Le courage de secouer nos inerties.
Nous invitons chacun à signer cette pétition dès lors qu'il partage aussi ces convictions sur l'avenir :

Le lien vers la pétition sur change.org :
 #TousavecColin



Duc et Yanai


Pour se faire sa propre idée, voici l'article original :
http://www.latribune.fr/opinions/tribunes/20131015trib000790737/taxis-vtc-les-fossoyeurs-de-l-innovation.html

Existe également en version anglaise pour vos amis anglophones :

lundi 21 avril 2014

Pour l'hébergement des données publiques par Cloudwatt

Liberté, égalité, fraternité ... données !

Une composante importante de la modernisation de l'Etat s'effectue au travers de la mission ETALAB, qui a inauguré il y a de cela quelques mois son excellent portail data.gouv.fr de partage de données ouvertes. Dans son audition au Sénat, son directeur Henri Verdier explique qu'en fait ce n'est pas l'Etat qu'il modernise mais la nation tout entière. Chaque citoyen peut en effet venir apporter ses propres données sur le portail, et les conséquences de cette mise à disposition vont se ressentir bien au-delà de la coopération entre les services de l'Etat.

Lancement de la v2 de data.gouv.fr le 18 décembre 2013
en présence de F.Pellerin, M. Lebranchu et J-M. Ayrault
Il observe que la culture "données" n'a pas encore fini de se développer au sein des administrations, et notamment il anticipe l'émergence d'une distinction entre données personnelles (attachées à un individu) et données privées (considérées intimes par l'individu).

Mais où donc héberger toutes ces données ?

Bien entendu, en France, sur notre territoire. Après, les données étant en libre accès, il n'est pas forcément nécessaire de les stocker dans un "bunker numérique". Eh oui, on constate là que souveraineté ne va pas nécessairement de pair avec "haute sécurité". Est-ce que pour autant on peut se contenter de prendre l'hébergeur le moins-disant ? Je ne le pense pas.

Car on perçoit nettement dans les propos d'Henri Verdier (de la minute 20 à la minute 40) tout le potentiel qui va progressivement se révéler à mesure que le portail s'enrichira de contenu, d'acteurs, et de processus. Ce qui semble aujourd'hui être une anecdote dans le paysage numérique de l'Etat, est amené à devenir à terme une infrastructure majeure de son fonctionnement. Et lorsque les services de la gendarmerie ou de la santé s'appuieront sur ce portail pour coordonner leur action sur le terrain, alors la qualité de l'hébergement deviendra cruciale : l'intégrité des données bien sur, mais aussi les temps de réponse, la continuité du service, et enfin la maîtrise de l'accès car même s'il est libre, il convient de s'assurer que personne n'utilise ces données à mauvaise escient.

C'est pourquoi j'estime qu'à un horizon 5 ans, il est crucial d'héberger les données de l'ETALAB au sein de la seule infrastructure Cloud souveraine qu'il nous reste en France : Cloudwatt. J'espère que Didier Renard, nouveau président de Cloudwatt, pourra y parvenir, coûte que coûte.

Pour bien s'imprégner des enjeux de l'open data et de la situation de la France à ce jour, cliquez sur l'image pour lancer la vidéo dans un nouvel onglet, et allez à 20'20" :
Julien RENCKI et Henri VERDIER sur l'accès aux documents administratifs et aux données publiques 


mercredi 16 avril 2014

Identité numérique : ne lâchons rien !

Dans la relation de "confiance" établie entre les géants du net et les individus du monde entier, il est un enjeu fondamental qui reste trop méconnu: celui de l'identité numérique.

La multiplication des outils et services en ligne que nous utilisons a été accompagnée d'une multiplication des logins et mots de passes à retenir pour accéder à ces services. Du moins jusqu'à ce que ces services commencent à lourdement s'interconnecter.

Car désormais, il est très difficile de lancer un service en ligne sans proposer un login social, appuyé sur ceux des géants Facebook, Twitter ou Google. L'intérêt pour le nouveau service: parcours client simplifié (donc taux de conversion élevé à l'inscription), profil enrichi instantanément (photo, âge, statut marital), et un accès privilégié à l'outil de base de la croissance: votre liste de contacts. Pour l'usager également, le calcul est vite fait. Pas de nouveau login, mot de passe, pas de 'captcha' ou de nouvel email de vérification, et l'assurance d'une meilleure sécurité. Car on peut certainement faire plus confiance à Facebook pour essayer de protéger sa base d'utilisateurs et mots de passe qu'à une jeune startup qui doit se concentrer sur ses problèmes de croissance. L'exemple du hack de Snapchat, une app dont on attend pourtant un grand focus sur la sécurité, nous l'a bien rappelé.



Aujourd'hui, ils sont une poignée dans le monde à se disputer ce marché de l'identité numérique: les suspects habituels et déjà bien identifiés - Google, Facebook, Twitter - mais aussi, plus discrètement, Apple, Microsoft, et... Salesforce ! Car il existe aussi un sous-marché centré sur l'identité numérique professionnelle.

Ceux qui tiennent nos logins ne sont pas seulement des prestataires de service: ce sont eux qui tiennent les clés d'accès au marché (nous) pour les prochaines grandes applications, ludiques, sociales ou professionnelles.

Tout a démarré avec Microsoft

On se souvient de Napster, qui est mort en ouvrant la voie de la disruption numérique dans la musique, au grand bénéfice d'Apple. De même, Microsoft a lancé en 1999 un programme d'identifiant numérique appelé Passport. Si on ne parlait pas d'identité numérique à l'époque, tous les éléments y étaient: il suffit pour s'en convaincre de lire ce communiqué de presse sur Hailstorm, un des services développés avec Passport. Extrait :

“ For instance, a task such as booking a flight using an online travel reservation service will become much more effective. "HailStorm" will help enable the travel service to automatically access the individual's preferences and payment information. If traveling on business, a users affiliation with their company's "HailStorm" group identity makes it possible for the travel service to automatically show only the choices that meet the traveler's individual preferences and which adhere to the companys travel policies. 

Nous sommes en 2001 (le communiqué parle de PDA), et l'expérience décrite ne paraît absolument pas choquante. Mais pourtant le marché n'était pas prêt, et les critiques sur le non-respect de la vie privée et des pratiques commerciales déloyales on forcé Microsoft, comme Napster dans le mp3, à faire marche arrière. 

Car facebook n'existait pas encore. Et aujourd'hui, les sensibilités ont évolué, et on confie volontiers à de nombreux opérateurs privés, basés à l'étranger, nos informations sociales, nos liens familiaux, nos statuts maritaux (plus là-dessus un peu plus loin).

Il faut dire que l'offre est attrayante: Google propose avec un identifiant - personnel sur Gmail ou professionnel via Google Apps - des services convergés d'email, d'espace de stockage en ligne, outils collaboratifs. Mais aussi des outils de paiement avec Google Wallet. Et une arme de choix dans cette stratégie de déploiement est la forte intégration avec les smartphones fonctionnant sous Android.

LinkedIn suit une voie similaire avec un focus accentué sur l'identité professionnelle, en offrant un login social à de nombreuses applications, et en faisant converger une pléthore d'outils et services développés ou acquis ces derniers temps: une nouvelle interface de gestion des contacts, Slideshare, l'outil de partage en ligne de présentations professionnelles, ainsi que Pulse, qui vous permet de suivre ce que les gens de votre réseaux lisent et partagent en ligne. Et comme ses concurrents, LinkedIn n'est pas à l'abris d'un faux pas : son CEO Jeff Weiner a en effet décidé de suspendre son service "Intro", pour lequel le grand public n'était pas prêt. Mais le schéma est aujourd'hui clair, et il ne faut pas en douter : il finira par revenir !

La particularité de LinkedIn, c'est qu'ils visent un marché pour l'instant distinct de Facebook, puisqu'ils s'intéressent à l'identité professionnelle, cherchant à capter de l'information sur la nature des échanges professionnels. Et il ne faut pas oublier un avantage clé du réseau social professionnel : l'accès à la masse de fournisseurs, clients, partenaires avec lesquels nous échangeons tous les jours. Ils sont peut-être en dehors des systèmes d'identification de Facebook et Google, mais ils sont sur LinkedIn !

La bataille fait rage

Signe de l'importance de l'enjeu: l'alliance avec Apple, qui a accueilli LinkedIn dans iOS. Même si peu d'applications en tirent profit aujourd'hui, c'est un avantage concurrentiel énorme, les iPhones et smartphones Android représentant la vaste majorité des téléphones professionnels.

Mais dans la bataille, il ne faut pas oublier Microsoft, qui contrairement à Napster, n'est pas mort, et a préservé son "Passport", qui est devenu le ".NET Passport", et renaît aujourd'hui sous le nom de "Microsoft LiveID". Cet identifiant est obligatoire pour utiliser la dernière version de son système d'exploitation, Windows 8, ainsi que ses outils de bureautique en ligne Office 365, et est déjà riche de plus de 300 millions d'utilisateurs.

Si en plus Microsoft parvient à redynamiser Yammer, le réseau social professionnel, en le rapprochant de son LiveID, et choisit de continuer d'imposer le même LiveID aux utilisateurs de ses smartphones (le rachat de Nokia servant avant tout à déployer auprès du public une vaste infrastructure pour accueillir ses services, à l'instar de l'iPhone et des smartphone sous Android), il restera un concurrent sérieux face au autres forces en présence.

Citons sans rentrer dans le détail quelques autres grands fournisseurs de "login sociaux" : Apple (votre AppleID sert à accéder aux services iCloud, iMessage, acheter des logiciels en ligne et même en présentiel dans les Apple Store, sans sortir sa carte bleue), Twitter, Yahoo!, Tumblr (détenu par Yahoo!), PayPal, Foursquare...

Un enjeu de société... et de souveraineté!

Lorsque Facebook propose à ses utilisateurs de déclarer leur situation personnelle en des termes comme "c'est compliqué", "partenariat domestique", ou "relation libre", la firme de Mark Zuckerberg est en rupture avec l'état civil Français. On peut certes y voir un reflet de notre temps, où les cases à cocher dans nos documents administratifs ne reflètent plus la complexité de nos liens avec la société. Je pense d'ailleurs que critiquer l'obsolescence de ces standards est tout à fait justifié. Mais c'est dans le pouvoir laissé à une puissance étrangère (et non-gouvernementale, d'ailleurs) que le bât blesse : c'est un codeur qui choisit quels champs sont disponibles, et non un législateur souverain, soucieux de la défense d'un intérêt national basé sur des valeurs, des règles de vie. 

De la même façon, c'est Facebook qui décide de l'âge à partir duquel un mineur a le droit d'avoir un compte sur sa plateforme (13 ans), ou la nature des informations autorisées à y circuler.

Mais c'est trop tard, non ?

Face aux moyens en présence, l'initiative d'identité numérique de la Poste (https://www.idn.laposte.fr/) peut paraître bien fragile. Mais elle a le mérite d'être une véritable initiative souveraine, et il serait bon qu'elle parvienne à assumer et être fidèle à cette mission.

Fragile, car on le sait, l'économie numérique est globale et il est impossible de rattraper un leader qui a pris la position dominante sur une industrie. Nicolas Colin l'exprime très clairement1  :

“ Dans l’économie numérique, les marchés sont toujours concentrés à l’échelle globale du fait des effets de réseau et d’une architecture toujours conçue pour la participation. Une fois qu’une position a été prise par une entreprise américaine, il n’y a plus de rattrapage possible par une entreprise d’un autre pays. [..] Sauf à ce que l’entreprise dominante s’endorme sur ses lauriers (= MySpace défait par Facebook), il n’est plus possible de partir à l’assaut d’une filière une fois que sa transformation numérique est achevée. ”

C'est vrai dans la plupart des domaines, et plutôt que de créer un Google français ou un Amazon français, les entrepreneurs et innovateurs d'aujourd'hui ont intérêt à se concentrer sur des industries qui n'ont pas encore été conquises par le numérique, et tenter d'aller cette fois plus vite que les américains.

Néanmoins pour l'identité numérique, c'est différent car il s'agit là de la plate-forme unificatrice sous-jacente à l'économie toute entière : si nous ne sommes qu'au début de ce choc de "numérisation", cette période de chaos durant laquelle toutes les industries vont être bouleversées les unes après les autres, il apparaît déjà que ces bouleversements s'appuieront toujours sur des outils d'identification numérique et le stockage de données personnelles (santé, assurance, banque, emploi, services administratifs, etc.). L'enjeu est donc tel que nous avons le devoir de proposer une offre alternative, souveraine, qui ne dépende pas des CGV des géants américains et de leurs accords avec la justice ou le gouvernement de leur pays.




1. [Lire à ce propos son billet complet : http://colin-verdier.com/l-industrie-du-taxi-a-la-frontiere-de-l-innovation]    

samedi 12 avril 2014

Desrtr

Monsieur le Président
Je vous poste un billet
A vous faire imprimer
Par votre chambellan
Mes amis m'ont appris
La mise en examen1
De mon ami Colin
Pour propos insoumis2


Monsieur le Président
Je rêve que la France
Se maintienne en avance
Des pays innovants
C'est pas pour vous fâcher
Il faut que j'en rajoute
L'ennemi sur la route
C'est le fils Rousselet

C'est pas très compliqué
Avec l'ami Henri
Ils ont tout bien écrit3
Ils ont tout expliqué
Croire que l'on peut freiner
Les vrais innovateurs
Juste en leur faisant peur
C'est là le vrai danger

Car si le monde entier
Rit de notre déroute4
Il ne fait aucun doute
Que peu vont nous aider
Nous devons commencer
Par nous aider nous-mêmes
Dans notre écosystème
Aux rentes nous attaquer


S'il faut des avocats
Plutôt que décrets5
Créons des sociétés
Comme le fait Nicolas6
S'il n'y a qu'un lobby
Pour votre servitude
C'est bien la multitude
C'est la démocratie

Oublions les taxis
Les ambitions d'Uber
Dépassent cette guerre
Soignons notre myopie
Les enjeux de demain
Ce sont les plateformes
Qui relieront les hommes
D'un pays souverain




Allez, et puisqu'il nous reste 3:30, on se ré-écoute la version originale, inimitable :




1. [http://www.latribune.fr/opinions/editos/20140410trib000824685/l-innovation-merite-t-elle-une-mise-en-examen.html]    
2. [http://www.latribune.fr/opinions/tribunes/20131015trib000790737/taxis-vtc-les-fossoyeurs-de-l-innovation.html]    
3. [http://www.amazon.fr/L%C3%A2ge-multitude-Entreprendre-gouverner-r%C3%A9volution/dp/2200277830/]    
4. [http://www.nytimes.com/2014/03/23/business/international/some-french-entrepreneurs-say-au-revoir.html]    
5. [ http://www.latribune.fr/entreprises-finance/services/transport-logistique/20140205trib000813763/le-delai-de-15-minutes-pour-les-vtc-suspendu-par-le-conseil-d-etat.html]    
6. [http://www.thefamily.co] et [http://www.meetair.co]    

jeudi 10 avril 2014

Gouvernance de Cloudwatt: oser Holacracy


Quand une ville double de taille, on estime que la productivité et la créativité par habitant croît de 15%. Pourtant dans les entreprises privées, la tendance est inverse : plus elles sont grosses, moins elles innovent ! C'est assez naturellement que certains sont donc allés chercher à adapter les organisations pour les faire plus ressembler à des villes. Avec peut-être un maire, mais surtout des citoyens maîtres des leur destin, mus par une Raison d'Etre, qui évoluent en entretenant des liens forts avec un petit groupe restreint et de nombreux liens faibles avec un "public" de tous les jours.

C'est ainsi que démarre la petite histoire de Holacracy(tm), le modèle organisationnel proposé par Brian Robertson aux Etats-unis, et rendu fameux depuis que Zappos a décidé d'adopter ce mode de gouvernance. L'histoire est racontée avec un peu plus de détails par Bernard-Marie Chiquet qui promeut ces méthodes en France au travers de son entreprise, et par une petite BD sur l'HolacracyTM disponible gratuitement en ligne (mais n'hésitez pas à acheter la version papier pour l'offrir!).

Avec ses 1500 staffs à Zappos,
Tony Hsieh mis sérieusement, à l'Holacracy...
Sous l'influence du succès de notre pratique du développement Agile, nous nous sommes assez naturellement intéressés au Management 3.0 ce qui nous a conduit à regarder de près Holacracy(tm). Et voici à quoi ça ressemble.

Dans le modèle traditionnel, on a un chef, et un seul chef. Les autres personnes avec lesquelles on travaille sont considérées comme des clients/fournisseurs internes, parfois appelés "chefs en pointillé" ("dotted line") dans les organisations matricielles. Mais dans l'ensemble, un individu a un et un seul chef au-dessus, et peut avoir entre 0 et n collaborateurs en-dessous. C'est cette contrainte qui donne des organigrammes en pyramide. D'un point de vue base de donnée, on appelle cela une relation 1-n (1 chef pour n collaborateurs).

En Holacracy(tm), deux grandes nouveautés : 
  1. on accepte la réalité que le lien hiérarchique est une relation n-n
  2. on accepte la réalité que le lien hiérarchique varie très souvent

En conséquence il faut découper très finement en différents rôles la fiche de poste d'un individu, et pour chaque rôle identifier qui est le chef pour ce rôle.
On n'a plus un seul manager mais plusieurs en fonction des différents rôles que l'on tient dans l'entreprise. Il faut donc contenter tout le monde, et bien sur, on ne choisit pas ses différents managers.
Les rôles qui vont ensemble sont regroupés en cercles.
Chaque cercle a son chef et les cercles sont hiérarchisés
Si cela a des avantages, cela reste assez compliqué à gérer et on comprend vite pourquoi avant l'ère numérique, ce type d'organisation n'était pas envisageable à grande échelle : il faut mettre en place un processus assez lourd pour adapter de manière continue et agile les différents rôles des différents individus, résoudre des conflits de superposition, les vides interstitiels, les priorités... Un outil informatique est nécessaire pour garder trace de sa propre fiche de poste qui devient détaillée et exhaustive.

Je pense que c'est un mode de fonctionnement qui convient bien à une organisation :
  • pas trop grande, disons moins de 250 employés car plus il y a d'interactions possibles plus la complexité augmente ;
  • de préférence sur un seul site où tout le monde parle la même langue car des échanges nombreux et réguliers son nécessaires pour ajuster en permanence les rôles ;
  • qui bossent dans les technologies de l'information car c'est une approche très très systématisée, inspirée par le mouvement Agile ;
  • dotées d'une culture sensible à l'open source puisque toutes les fiches de postes sont partagées de manière transparente en ligne ;
  • avec beaucoup de cadres ou d'employés très autonomes afin de compenser la dilution de l'autorité parmi plusieurs personnes d'une part, et parce que cette diversité demande de fortes capacités d'abstraction ;
  • ayant l'innovation au coeur de leurs enjeux, un bénéfice attendu de la part de cette gouvernance ;
  • idéalement plutôt jeune afin de limiter le passif de trop d'années passées en mode traditionnel
  • qui ont une Raison d'être bien définie pour les porter afin de donner une cohésion d'ensemble en l'absence d'un figure inspiratrice unique (le chef).

Pour Officience, la société de services numériques que nous avons cofondée en 2006, nous y avons beaucoup réfléchi ces derniers temps car elle coche pas mal de cases... mais pas toutes ! Nous avons donc finalement continué sur notre propre voie, ce qui est une autre histoire.

Par contre, est-ce que Cloudwatt ne serait pas un bon candidat ? Je pense que la question mérite d'être soulevée...

vendredi 4 avril 2014

Ma candidature à la DG de Cloudwatt : déjeuner avec Nadine Pichelot, interim PDG

Chère Nadine,

Ce fut un véritable plaisir de déjeuner ensemble hier, merci d'en avoir pris le temps. Et pour commencer bien entendu, toutes mes félicitations pour avoir obtenu la confiance du Conseil de Surveillance qui vous a investit de la plus haute responsabilité exécutive en attendant la nomination officielle du successeur de Patrick Starck. La période sera courte mais c'est une période critique et sans vouloir rajouter de la pression, 15 jours à la barre en pleine houle sont parfois plus décisifs que 6 mois de mer calme...
Photo trouvée sur Internet, je n'ai pas eu l'idée d'en faire une !

La vision stratégique

Merci aussi de vous être intéressée à ma lettre de candidature. J'espère qu'à la lumière de notre discussion elle vous paraîtra plus concrète. Je crois que le point fondamental, que je n'ai peut-être pas assez explicité, est que Cloudwatt doit redéfinir sa mission autour d'un seul objectif, une seule cause fédératrice : la souveraineté nationale. Et ceci contre vents et marées, en supportant les quolibets de ceux qui n'en font que peu de cas, mais en resserrant solidairement autour de nous les rangs de ceux qui ont pris conscience de l'ampleur de ce défi.

Il existe bien entendu d'autres nobles causes à défendre, mais il faut se résoudre à concentrer Cloudwatt sur une seule, afin de s'en servir comme de l'étoile du nord sur laquelle chacun peut poser ses yeux pour se guider, en particulier en cette période confuse de transition managériale. Je pense notamment à tous ceux qui défendent plus la cause d'Openstack que celle de Cloudwatt, et je recommande de leur proposer un nouveau véhicule, quelque chose comme la fondation Openstack France ou équivalent, une organisation qui elle serait dédiée à la cause Openstack. Bien entendu il y a des implications financières et humaines qui méritent beaucoup de considération, mais sur le fond c'est la transition que nous devons effectuer afin de produire une organisation qui avance en harmonie avec elle-même.

Oui mais comment ?

Alors, comment traduire cela en actions concrète, à court terme, demain ? Question délicate car l'appartenance à une cause, c'est une expression identitaire ("J'y crois" / "Je n'y crois pas") que chacun voit mûrir en soi, progressivement. Et comme toute prise de position individuelle on y aboutit au terme d'un cheminement intérieur pour lequel on ne peut agir que de façon assez limitée de l'extérieur : il faut informer, laisser chacun se faire sa propre opinion en la confrontant à beaucoup d'autres, souvent, régulièrement. Ce qu'on peut faire à court terme, donc, c'est instaurer les conditions de ce dialogue.
Exemples :
  • Mise en place de l'Intranet ou mieux un réseau social interne
  • Politique volontariste envers les réseaux sociaux dominants (Twitter, Facebook, LinkedIn) afin d'y voir se développer des échanges publics
  • Rencontres régulières (au petit déjeuner par exemple)
  • Utilisation du "chat" et des mailing lists plus intensive
  • Lean Coffee
  • "Zoom sur..." mini-interview de présentation des différents salariés
  • etc.

Les clefs de la naissance du dialogue

Un aspect important pour assurer une grande fluidité des échanges est de réduire la taille unitaire des échanges afin de minimiser les coûts de transaction. Pour une organisation classique l'élément d'échange de base est le mail de 10 lignes qui prend 20 minutes à écrire. Il faut développer des pratiques qui permettent de réduire cela afin d'augmenter la fréquence des échanges à effort égal. Ceci en réduisant le niveau d'exigence sur les mails ou en passant sur des nouveaux supports (chat, twitts, posts, ...) et en privilégiant les communications ouvertes "1 à n" (post) sur les communication fermées, "1 à 1" (mail).

Le deuxième aspect important qui va libérer les échanges est que les employés prennent la permission de s'exprimer. Pour cela il est important de montrer l'exemple, car un jeu de règle ne saura jamais être assez précis. Il faut faire évoluer la culture de l'entreprise de "je n'ai le droit de rien dire sauf ce qu'on m'autorise, et si je fais une erreur je serai sanctionné par mes collègues" vers "j'ai le droit de tout dire sauf ce qui est interdit, et si je fais une erreur je serai pardonné/aidé par mes collègues" Pour cela rien de tel que de démarrer le mouvement avec quelques "first followers", comme l'explique si bien Derek Sivers.

Enfin, s'il reste des managers qui n'en sont pas encore convaincus, il faut populariser cette réalité de notre siècle que l'influence ne s'acquiert plus en retenant une information rare,  élitiste, et pérenne mais au contraire en distribuant copieusement une information abondante. Car avec la vitesse où notre monde évolue, les informations ont une durée de validité si courte que l'enjeu réside dans trouver une bonne source plutôt que de trouver une bonne information.

Echanger, parler, discuter... Conversation is King, comme dit Cory Doctorow !

A noter que cette pratique ne s'arrête pas aux limites de l'organisation, dont les contours en deviennent moins précis. Du coup il s'agit également d'engager le dialogue avec l'écosystème complet du Cloud en France !


Café Renaud, bonne adresse !

mardi 1 avril 2014

Facebook au service de la FrenchTech

Et si, dans notre challenge de souveraineté numérique, notre meilleur allié était Facebook ?

Certes l'idée peut paraître incongrue : Facebook est la société qui a pris la plus grande avance dans la gestion de l'identité numérique. Lorsqu'on lance ou développe un service en ligne, il est devenu presque impossible de se passer du "facebook login" pour recruter de nouveaux utilisateurs. En deux clics, on remplace nom, prénom, adresse email, mot de passe, l'envoi d'un email de vérification, et en plus, on enrichit instantanément le profil de l'utilisateur d'une photo, la liste de ses amis...

Google, LinkedIn et Twitter suivent de près, ainsi que d'autres acteurs plus discrets, mais tout aussi conscients de l'enjeu (Microsoft, Apple, et même Salesforce)

En revanche, un domaine dans lequel Facebook n'est pas en tête, c'est le data center. 

Cela fait près de 10 ans que Google conçoit ses propres machines, après avoir modifié celles des autres. En 2001 déjà, Google équipait ses racks de serveurs avec des machines bon marché, en tirant profit de leur savoir-faire logiciel : en effet, leur architecture intégrant une gestion très poussée de la distribution des données et de leur redondance, il devenait beaucoup plus économique d'utiliser des machines un peu moins fiables, mais beaucoup moins coûteuses que les solutions haut de gamme de Dell, HP ou IBM. Le logiciel faisait le reste. Et lorsque Chris Pinkham a réalisé ce que faisait Google, il y a dix ans, Amazon a emboîté le pas, au grand dam de HP (très bien raconté dans cet article de Wired).

Google production server, a.k.a. corkboard server. Photo courtesy of Marcin Wichary

Facebook a suivi plus tard. Et la grande surprise, c'est que contrairement à Google et Amazon, qui géraient leurs innovations et architectures comme des secrets industriels, la firme de Mark Zuckerberg a décidé de prendre la voie de l'opensource. En 2011, donc, le projet Open Compute voit le jour. En effet, quel espoir avait Facebook, malgré ses énormes moyens, de rattraper un jour l'avance de Google, tant intellectuelle (R&D) que matérielle (volume de machines fabriquées, données d'exploitation, etc.) ?
Le seul espoir résidait dans la multitude. Car mettre tout le monde au travail sur un même projet et leur permettre d'en exploiter les fruits, c'est à la fois bénéficier de la contribution de chercheurs et développeurs non salariés (ou du moins pas par eux), et des économies d'échelle, puisque les fabricants ne produisent pas que pour eux.

On notera que Google a suivi le même chemin en faisant d'Android une architecture ouverte, afin d'avoir une chance de rattraper l'avance prise par Apple avec l'iPhone. If you can't beat it and you can't buy it, opensource it !

Open Software + Open Hardware : un atout de souveraineté ?

Je rebondis bien entendu ici sur cette lettre, dans laquelle Duc Ha Duong annonce ses propositions pour développer Cloudwatt et lui permettre de remplir sa mission de Cloud Souverain. Il me semble fondamental de souligner que l'adoption d'OpenStack par Cloudwatt et Numergy est un très bon choix. Vision long terme, et la meilleure garantie de performance et de vigilance. Non seulement grâce à la masse des contributeurs, mais aussi pour des raisons de sécurité: une organisation ouverte est quasi impossible à corrompre.

Grâce à l'initiative de Facebook, on a la même opportunité pour le hardware, et je ne serai pas surpris si après une phase "best effort" basée sur des infrastructures existantes, Cloudwatt et Numergy commencent à développer des data centers à base d'Open Compute, ou nouent des alliances avec des hébergeurs FrenchTech utilisant ces technologies.

Après Linux, Mozilla, Wikipedia, et Android, je reste abasourdi qu'il faille encore lutter autant pour convaincre de la puissance des modèles Open. L'Open n'est pas une arme à double tranchant et ce n'est pas très compliqué de choisir le bon côté.