lundi 31 octobre 2016

Le phénomène Julien Letailleur

Qui est Julien ? Quel est son agenda ? En quoi cela me concerne ? Est-ce que ça sert à quelquechose ?
Julien est le héros du roman “Un peuple totalitaire”, roman en cours d’écriture mais dont on peut déjà lire les 8 premiers chapitres en ligne. Pour la faire courte, Julien est un conseiller du Président de la République qui utilise les dernières technologies numériques pour déployer une nouvelle forme de démocratie (plus directe, plus liquide…). Et il faut en affronter les conséquences…
Pendant ce temps, dans notre monde à nous, émergent des mouvements tels que #MaVoix, Laprimaire.org et autres expériences démocratiques. La réalité va-t-elle dépasser la fiction ? En tout cas, l’occasion est trop belle : Julien décide de venir dans le monde réel, à l’image de Tom le héros de “La rose pourpre du Caire” qui s’échappe de son film. De ce moment, Julien n’est plus la marionette de son créateur original, Antoine Brachet, mais il prend son indépendance pour devenir l’instrument de la Multitude citoyenne. Et il décide de se présenter à l’élection présidentielle de 2017 afin de porter la voix de cette Multitude.



Son point fort ? Il n’a pas d’ego, il n’existe pas. Il pourrait même être une femme et s’appeler Julia. Du coup bien sûr, il aurait du mal à gouverner, mais là n’est pas le point. L’objectif du phénomène Julien est justement de profiter de son inexistence pour tordre le coup à ce mythe de l’homme providentiel. Et du coup, inviter un maximum de personnes à endosser sa casquette de citoyen de façon plus récurrente, plus continue que 5 ou 10 minutes dans un isoloir tous les 5 ans. Et pour cela, 3 paris, 2 opérations, 1 objectif.

Les 3 paris : la loi du ROI

— Responsabilité : nous sommes tous responsables autant que libres, n’avons pas besoin de tutelle, ni de sauveur.
Optimisme : Notre posture par rapport au futur est un choix délibéré. Nous avons la volonté de bouger les choses sans béatitude.
— Intelligence : Tout le monde peut s’emparer et se positionner sur tout sujet.

Les 2 opérations : “Je crie donc j’existe” et “un kawaa avec Julien”

Je crie donc j’existe nous invite à proposer des messages (optimistes, intelligents et responsables, bien entendu) sur une page Facebook. On peut aussi se contenter de lire ceux des autres et voter ce qui nous plaisent le plus. Mais si on souhaite aller plus loin on peut aussi se munir d’une casserolle, d’une spatule, d’un ami, et d’un smartphone, pour aller crier ses messages préférés et les poster en ligne. Tout est expliqué ici :https://www.facebook.com/jecrie



Un kawaa sans Julien (je viens d’inventer le nom) est une série de meetups visant à réunir les citoyens que nous sommes afin de voir émerger les sujets dont nous souhaitons véritablement entendre parler durant cette campagne présidentielle. Savamment conçu et animée par des pros de l’intelligence collective, le premier rendez-vous, le 3 novembre, sera l’occasion de tester le format, sur le thème : “l’Etat Agile”. Voici les liens liés à l’événment, qui aura lieu au NUMA le 3 novembre prochain :
Cette soirée ensemble aura pour objectif non seulement de faire émerger des questions (Intelligentes, Optimistes et Responsables !) mais aussi d’accélérer la “dilution” de Julien Letailleur parmi la multitude que nous formons, car nous sommes tous Julien et Julia, et il est donc important que d’autres qu’Antoine prennent la permission de “porter le porte-voix”, et pas seulement en province mais aussi sur les big média et les médias sociaux.
Si vous souhaitez influencer le choix des prochains thèmes, le sondage est ici, mais ne vous contentez pas de voter, invitez vos amis à faire de même pour avoir plus de poids dans le sondage ! Education, Futur du Travail, Identité humaine ont déjà pas mal de votes.



1 objectif :

Nourri par l’abondance et le fourmillement chaotique des idées criées dans la rue, où nous nous ré-emparons, nous citoyens, de la parole publique, puis impliqués dans ces moments de co-création plus intenses, Julien/Julia Letailleur espère être un outil permettant à la Multitude que nous sommes de porter sur le débat public les sujets qui nous sont les plus chers, nourissant ainsi à la fois un engagement citoyen et une réflexion politique, et polarisant le débat public autour de la campagne présidentielle.
Voilà, vous savez tout, il n’y a plus qu’à vous inscrire pour la soirée du 3 novembre, j’ai hâte de co-créer avec vous !

samedi 4 juin 2016

Un espoir pour le monde

Ces derniers siècles, notre humanité a exploré deux grandes pistes pour réussir à vivre ensemble : la droite et la gauche.

La première dit : si je m’occupe bien de mon prochain, de mon entourage proche, les 150 personnes de Dunbar, et que tout le monde fait pareil, de proche en proche, on devrait avoir la paix sociale. La limite est assez évidente : ces 150 sont de ma religion, ma couleur de peau, ma région, mon niveau social … si bien qu’il est difficile en fait de faire coexister tout ce monde.

La seconde dit : non, il faut arriver à se regrouper à l’échelle de la nation, 10 millions, 60 millions de personnes, et arriver, pour vivre ensemble, à se coordonner pour faire émerger une direction commune. La limite, cette fois, est qu’il est bien difficile d’empathiser avec 60 millions de personnes, et donc d’accepter de transiger pour elle, pour ce fameux “bien commun”.



Quoi de pire : trouver des idiots dans votre camp ou des gens bien de l’autre côté ?
En fait, il semble que ce seuil de 150 personnes soit lié à la taille de notre Néocortex, donc une limite physique de notre cerveau.

“Mais moi, j’ai 2 000 amis sur Facebook” me direz-vous. Oui, mais si je vous demandais de les lister, de tête, combien en resterait-il ? Et de fait, vous serez surement d’accord avec moi pour dire que ces 2 000 ne sont pas tous vraiment vos amis. Il y a des relations, des connaissances, même parfois des quasi-inconnus. Alors, comment qualifier ces 1 850 ? Si “ami” est abusif, comment les appeler ? L’expression “Ami Facebook”, “Ami au sens Facebook du terme”, semble se populariser. En tout cas, ce ne sont pas des inconnus complets. Vous pouvez voir un bout de leur vie, qui sont leurs proches, où ils vivent, plus ou moins plein d’autres choses. Si vous deviez choisir entre prêter 100€ à un tel “ami Facebook”, ou à un étranger complet, le premier aurait sans doute vos faveurs, il est plus facile à retrouver.
Vous voyez ce que je veux dire ?
Si l’on classe toutes ces personnes en fonction de votre niveau de connivence, on obtient une courbe décroissante, un dégradé progressif de confiance. C’est un phénomène bien connu du monde numérique, la Longue Traine (“long tail” en anglais). De façon similaire, Amazon a en référence 150 best-sellers vendus à des millions d’exemplaires, puis des millions de livres vendus à 150 exemplaires, lesquels n’auraient pour la plupart, jamais eu la chance d’exister avant l’ère numérique. Et les quelques-uns qui auraient été imprimés, seraient considérés comme des bides, des échecs, des erreurs.

Nous développons donc tous une “longue traine” d’amis, une population de plusieurs milliers de personnes que l’on connait à des degrés divers mais jamais intense. On les appelle parfois nos “liens faibles”, ou notre second cercle.
Illustration : Mai Lan
Par leur quantité et leur variété, ces liens faibles jouent un rôle crucial dans notre expérience en ligne. Par exemple :

  • un crowdfunding est un dispositif voué à collecter de l’argent auprès de ces liens faibles.
  • c’est en analysant ces liens faibles que les algorithmes arrivent à discerner notre profil et mieux nous cibler
  • ils sont à l’origine de ce phénomène appelé “sérendipité”, nom compliqué pour parler d’un heureux hasard (je retrouve mon copain de primaire 30 ans plus tard chez un client), qui en fait n’est plus tellement un hasard mais un effet statistique.

Mais alors puisque je n’ai pas, au quotidien, conscience de ces liens faibles, comment pourraient-ils influencer ma vie, mon comportement ? Imaginez-vous en train d’écrire un statut sur votre réseau social préféré. Au détour d’une analogie, vous commencez une blague d’un goût douteux sur, disons, les asiatiques. A ce moment précis, par le plus grand des hasards, vous vient à l’esprit le visage de votre ami chinois, cet ancien collègue qui vous avait accepté à l’époque .. Vous l’imaginez en train de lire ça, la tête qu’il va faire, sa réaction … et hum, vous vous dites que finalement elle n’est pas si spirituelle que ça, cette blague, et vous l’effacez. Et voilà, comment un lien faible peut remonter dans votre conscience et influencer votre comportement. Sans même qu’il le sache lui-même. Il est par ailleurs fort probable qu’il ne le lira jamais, votre statut, mais peut-être que si, vous ne savez pas, et vous ne pouvez pas savoir, et d’ailleurs, les écrits restent, il pourrait tomber dessus un jour futur, dans 1 an, qui sait :-) ?
Mieux vaut être chinois pour se moquer des chinois... et marrant de préférence !
On voit là une nouvelle forme d’expression émerger. Qui n’est pas de la correspondance privée comme la lettre papier on son équivalent électronique, le courriel, mais pas non plus de l’expression totalement publique. Une nouvelle forme dont notre cadre juridique actuel n’avait, pas prévu l’existence, comment l’aurait-il pu ? J’espère que nous saurons adapter la loi à la réalité promptement, plutôt que nous entêter à faire entrer au forceps ces nouvelles pratiques dans un cadre devenu désuet.
Ainsi il y aurait une sorte de processus cognitif qui saurait déjouer la limitation physique de notre pensée consciente, notre néocortex, pour nous permettre d’intégrer dans notre attitude au quotidien les 2000, les 3000 liens faibles. Et la grande différence c’est que dans les 3000, vous avez tout : toutes les confessions, toutes les ethnies, toutes les conditions humaines. Ce qui fait une grosse différence. Le regard cumulé, même si inconscient, de tous nos liens faibles, affecte notre expression, nos attitudes, notre comportement. Nous pouvons empathiser avec eux car nous imaginons leurs visages. Et ils nous offrent, ensemble, une appréhension plus fidèle de la société, l’écosystème qui nous entoure.

L’ère industrielle s’est appuyée pour se construire sur la seule pensée consciente, à l’origine de la construction rationnelle de notre société et de l’organisation scientifique du travail. Je crois que nous en avons atteint les limites, et que nous devons, pour aller plus loin, remettre à contribution d’autres zones de nos cerveaux, dont la capacité cognitive est tout à fait remarquable*. Et justement, les technologies numériques nous le permettent en nous apportant les moyens techniques pour entretenir notre relation avec nos liens faibles.

Je ne sais pas si l’homme est né bon, ou neutre, ou pas bon, mais j’ai la conviction que l’homme est un animal social, qui a besoin de se sentir en connexion avec ses pairs. Et qu’en accroissant la portée de nos connexions, au travers de plus de transparence et de permanence, le comportement de chacun va s’améliorer, au sens tendre vers une meilleure harmonie avec les autres.

Voilà d’où me vient mon optimisme pour le monde, qui me fait refuser d’accepter l’argument “qu’il y a toujours eu des guerres, donc il y en aura toujours”, qui me fait penser que maintenant, nous avons devant nous une opportunité qui n’a jamais existé avant. Non sans efforts et acceptations de nouvelles façon de vivre, j’en suis conscient !

*Lire à ce sujet l’excellent “Blink” de Malcom Gladwell qui regorge d’histoires à peine croyables sur les capacités non conscientes de notre cerveau.
photo : Loïc Swiny
Pour aller plus loin, je vous propose d’explorer 3 autres pistes :
Mais si vous voulez changer de sujet, allez donc voir la liste complète des questions ouvertes sur Curious.so !

mercredi 23 mars 2016

Un site web ? Très bien. Mais vous ne voudriez pas plutôt une communauté engagée ?

Chers tous,

A la fin de notre réunion, j'ai beaucoup apprécié le tour de table de feedbacks. Je reste néanmoins dans l'inconfort d'un léger sentiment de culpabilité de n'avoir pas pu/osé vous donner mon propre retour complet, alors j'ai pensé vous le faire présentement, par écrit.

En tant qu'association, que groupe social déjà formé, votre communauté existe déjà. Il semble même que la ou les cause(s) qui la font vivre sont clairement conscientisées voire identifiées. La création d'un outil pour la supporter peut être vue comme visant à la faire vivre dans le monde numérique, (donc de la "créer" sur internet), mais au final il s'agit surtout de la renforcer dans ces autres mondes intangibles que sont les coeurs et les esprits de ses membres. Les critères de succès à rechercher sont donc plus des symptômes de l'engagement (nombre d'interactions, intensité de ces interactions) que dans un périmètre fonctionnel (nombre et complexité des fonctionnalités livrées).

Pour faire réussir un projet de renforcement d'une communauté par le numérique, il est fortement avisé d'avoir soit dans l'équipe, soit dans l'accompagnement de votre équipe des personnes versées dans la gestion des communautés augmentées par le numérique. Une bonne indication serait qu'ils aient un score Klout supérieur à 50 par exemple. Ou quelqu'un qui sache expliquer pourquoi Klout c'est pas bien via sa propre théorie de l'engagement. Je vous invite à identifier cet expert qui va pouvoir vous faire bénéficier de son expérience dans les relations sociales en ligne.

Il est également important d'identifier un "champion" de votre cause, la personne engagée dont on sent qu'elle a un investissement personnel fort dans la cause qui fédère la communauté. S'identifiant tellement à elle qu'elle se sent légitime pour parler en son nom. Le community management ce n'est pas un stagiaire qu'on recrute à postériori pour tweeter du contenu éditorial, c'est plutôt le coeur du réacteur, incarné par le premier militant qui a épuisé toutes les moyens possibles pour exécuter sa mission à la main, et qui rêve d'un outil pour pouvoir intensifier l'impact de son action.

Il ne faut pas forcément beaucoup de moyens pour démarrer un mouvement...

A défaut d'avoir ce "premier influenceur" (mais franchement il semble difficile de faire sans : quelle secte n'a pas de gourou ? Quelle organisation n'a pas de leader ? Quel mouvement n'a pas ses meneurs ?), si on a déjà un outil existant il est tentant d'aller voir les utilisateurs pour leur demander ce qu'ils en pensent et comment l'améliorer. Simplement attention dans ce cas à garder à l'esprit cette citation attribuée à Henry Ford : "Si j’avais demandé aux gens ce qu’ils voulaient, ils m’auraient répondu des chevaux plus rapides". Car votre communauté, pleine de bonne volonté, essaie 1. de rester dans le sujet et donc si on leur montre un webzine, ils vont rester dans le cadre webzine 2. de vous faire "plaisir" en cherchant "la bonne réponse" et donc proposer des améliorations en incrément de l'existant. Ils vous disent "il faudrait plus de personnalisation". Ils pensent en fait : "Si il fallait rester dans le format webzine et faire un meilleur webzine, il faudrait plus de personnalisation". Et ils oublient de vous dire "De toute façon même une fois bien personnalisé, j'admettrai que c'est un bon webzine, mais je ne le lirai pas plus pour autant..." Certains promettent pourtant, très sincèrement sur le coup, qu'ils le liront ... ils auront beau jeu plus tard de dire que ce n'est pas encore assez bien personnalisé. Moi qui n'aime pas la télé, montrez moi une émission je peux vous suggérer plein d'idées pour l'améliorer : je ne regarderai pas plus la télé pour autant.

J'ai ressenti une certaine frustration face à mon incapacité à vous projeter dans un futur qui vous séduise. C'est malheureusement un travers typique des appels d'offres en aveugle. Le manque d'intimité avec votre projet ne nous permet pas de vous proposer en confiance une solution qui va créer l'engagement que vous recherchez dans votre communauté. Vous nous demandez si on sait faire de la plomberie, on vous a répondu que oui. Mais si vous vouliez une idée de design pour votre cuisine, il fallait nous inviter chez vous ! Car il nous faut voir les dimensions, les entrées de lumière, la circulation, l'agencement des pièces autour...

Par exemple, voici en vrac quelques idées d'apps toutes simples de vous pourriez proposer à votre communauté pour en renforcer la cohésion :

  1. "Joyeux anniversaire !" : une app qui aide chacun à se souvenir de qui c'est l'anniversaire aujourd'hui, et, en fonction de ma proximité avec cette personne, je me vois proposer un choix d'engagement possible allant de "passer outre" à "prendre rendez-vous" en passant par "laisser un petit message" et "envoyer un like".
  2. "Je suis dans ta ville" : quand je voyage disons à Pékin, l'app le détecte par géolocalisation, et me propose d'envoyer une notification à tout ou partie des membres de la communauté déjà basés à Pékin.
  3. "Causons entre nous" : une application de chat propriétaire pour la communauté, dans laquelle ils se sentiront plus en intimité qu'avec les outils publics à la confidentialité douteuse. Tous les profils sont authentifiés, pas d'anonymat. Le contrôle de la plateforme permet d'intégrer des fonctions avancées (par exemple créer des cagnottes pour se cotiser à cadeau commun..)
  4. "Le Majordome" : un "bot" avec lequel les membres de la communauté peuvent interagir en langage semi-naturel, via une plateforme de chat (potentiellement celle du point 3 mais pas forcément : il peut être présent sur plusieurs canaux). Il peut alors offrir des services de mise de relation, de recherche dans l'annuaire de la communauté, voire des services plus complexes de type conciergerie, avec au besoin une assistance par un opérateur humain.
La liste est loin d'être exhaustive... échange de bons plans, petites annonces, entraide... pour trouver les 2-3 services qu'il faut lancer en premier, il faut une connaissance de votre communauté dont je ne saurais me prévaloir. Et à ce titre, il faut prendre ces idées pour ce qu'elles sont : des exemples. Il faut remarquer également que l'appétence pour la plupart de ces idées peut très bien se tester sans écrire une seule ligne de code, en opérant le service à la main, à petite échelle, pour voir.

En guise de conclusion je citerais un penseur canadien, Cory Doctorow : "Content isn’t king. If I sent you to a desert island and gave you the choice of taking your friends or your movies, you would choose your friends…. If you chose your movies, we would call you a sociopath. Conversation is King, content is just something to talk about". Le contenu qui va fidéliser vos utilisateurs, c'est le contenu qui va leur fournir l'occasion de créer ou d'améliorer leurs connections à d'autres personnes physiques, en chair et en os, dans ou près de votre communauté, car il leur permet d'exprimer qui ils sont, ce qu'ils pensent, ou ce qu'ils aiment.


Et pour continuer la conversation, voici quelques articles récents pertinents dans ce contexte :